Tendance : le marketing du mystère

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Quelle belle époque nous vivons : en constante évolution entre résilience et sur-consommation, entre sobriété et avidité… Intéressons-nous à un phénomène pas si récent mais remis au goût du jour :  le marketing du mystère.

 

Le marketing du mystère : décryptage

Pour expliquer simplement, il s’agit de vendre des produits à des consommateurs qui ignorent la nature de ces produits. Un achat à l’aveugle en somme. Les mécanismes sont assez simples et activent des réactions liées à notre comportement.

Attiser la curiosité, donner envie dans le but de provoquer l’acte, pas de surprise jusqu’ici. Mais réussir à vendre des cartons remplis d’objets dont nous ne connaissons pas la nature, acheter le contenu d’un chariot mystère sans même savoir ce qu’il comporte… Des pratiques qui se développent vitesse grand V !

Exemple proposé par Olivier Dauvers dans son décryptage hebdo « Samedi Conso » :

« Normal à Lyon. Après les « chariots mystère » d’Auchan, le « Mystery bag ». L’époque est à la surprise ! Ne vous attendez quand même pas à découvrir un iPhone… »

Olivier Dauvers decryptage retail

Je vous parle d’un temps…

Etant de la génération Y, je me suis souvenue que lorsque nous allions au tabac-presse du coin, je rêvais d’avoir un cornet ou pochette surprise. Vous souvenez-vous de ces fameux cornets en papier dans lesquels se trouvaient deux trois gadgets ? Le principe de la surprise ! La joie de découvrir et d’être étonné bien sûr.

Un peu moins répandu aujourd’hui, je peux vous assurer qu’ils sont toujours aussi attractifs pour les enfants ! (expérience vécue et je n’ai pas cédé !). Notre cerveau aime ce mécanisme qui consiste à satisfaire la curiosité.

Quand le marketing s’empare du sujet

Récemment, l’anti-gaspillage est devenu un combat. Pour permettre d’écouler des stocks destinés initialement aux ordures, les marques et enseignes proposent aux consommateurs d’acquérir ces biens à un prix attractif mais à l’aveugle ! Est-ce devenu un simple argument marketing ou une réelle volonté d’agir contre le gaspillage.

Sur ce point, Jeanne Guien philosophe et spécialiste de l’histoire de la consommation, interviewée par France Info précise : « Le consommateur dépense et a l’impression d’économiser. Tandis que l’enseigne prétend perdre de l’argent alors qu’en fait c’est elle qui économise. L’enseigne se débarrasse d’objets qui n’allaient plus rien lui rapporter, voire qui lui aurait coûté parce qu’il n’y a plus de demande pour ces produits, ce sont des invendus. Les enseignes transfèrent sur le consommateur, la responsabilité de la surproduction. C’est toujours résoudre le problème du gaspillage en faisant consommer plus. » 

Mais d’un autre côté, que serait devenu ces produits invendus, bradé dans des enseignes spécialisées (ce qui revient grosso modo au même), ou pire… détruits ?

 

Ce qui est étonnant c’est que la potentielle déception est moins forte que la curiosité, d’où le succès de ces colis et autres contenants « surprises ».

 

Acheter sans savoir ce que l’on achète : un argument de vente !

Un concept qui ne date pas d’hier, un certain Doyle Owens a eu l’idée dans les années 70 de commercialiser des bagages égarés dans les trains, cette société existe toujours sous le nom de « Unclaimed Bagage ».

Plus récemment, les concepts ne cessent de se décliner et de faire preuve d’originalité. Comme chez Flamingo, leader des colis mystères, dont le concept est de revendre des colis perdus. Des colis achetés au Kg, avec une promesse « Vous recevrez un colis rempli de produits inattendus, pour une expérience unique et excitante. » en ajoutant à cela l’opportunité d’un bon investissement entre le montant dépensé et la valeur réelle des articles. En cette période d’inflation, l’argument peut convaincre.

Autre exemple, celui des chariots mystères. Vous pouvez acquérir des produits variés, qui sont en réalité des invendus, mais sans en connaître les détails. Vous noterez tout de même que nous sommes prêts à acheter des produits qui n’ont pas trouvé preneur une première fois. Et si nous poussons le vice un peu plus loin, ce sont peut-être des produits que nous n’aurions pas acheté s’ils avaient été à leur place, en rayon ! Toujours-est-il que ces opérations chariots mystères coup-de-poing font fureur.

La bonne affaire ou la désillusion ?

Lorsqu’on porte un regard très pragmatique sur tout cela, on se dit que c’est quand même curieux d’acheter quelque chose sans savoir ce dont il s’agit, c’est un peu l’inverse d’un comportement responsable.

*J’ai un besoin > j’achète le produit > besoins satisfaits – SATISFACTION

*J’achète des contenants mystères > je découvre mes produits > SATISFACTION de la curiosité mais pas d’un besoin, la DÉCEPTION est aussi une option à envisager.

Dans le premier cas, pas de surprises, l’objectif est clair. Dans le second cas, l’issue est moins certaine.

Comment expliquer le succès d’un tel phénomène ?

Les sciences cognitives apportent des éléments de réponse. La curiosité découle de mécanisme bien spécifique,  et certains chercheurs s’accordent à dire que « La curiosité est l’une des pulsions humaines les plus importantes ». Elle serait à l’origine de notre créativité et de notre capacité à apprendre. Elle fait donc partie de notre « être ».

Voilà ce qui expliquerait le succès de ces opérations marketing, elles déclenchent des réactions positives, qui poussent le consommateur à agir, et donc à acheter. Bien ou mal, l’idée est de comprendre des tendances et de les décrypter.

Alors, êtes-vous de ceux qui se laisseraient tenter par un colis surprise ?

Résultat d’un sondage publié en mars 2024 sur LinkedIn et Instagram :

Acheter des colis perdus ou acquérir le contenu de chariots mystères … pour vous c’est :
22%
28%
44%
6%

 

Mon réseau n’aime visiblement pas les surprises !

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